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Virgile - Zidrou et Lucy Mazel

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Publié le
1 octobre 2025
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Virgile, que sa femme a quitté pour refaire sa vie avec un autre après vingt ans de mariage, se retrouve un matin à grimper sur une échelle pour secourir un chat coincé dans un arbre. C’est alors que survient l’accident bête. Après une chute, Virgile se réveille à l’hôpital, tétraplégique. Privé de l’usage de ses quatre membres, sa vie se réduit désormais à observer le plafond et à philosopher sur sa nouvelle condition d’homme allongé.

Entouré de ses filles, de ses petites-filles et de ses anciens camarades de basketball – sa passion de toujours – il traverse ainsi plusieurs années en résidence à l’hôpital, devenu sa maison, rythmées par des soins divers qui n’ont d’autre but que de le maintenir en bonne santé. Virgile s’accroche tant qu’il peut mais lui vient cette conclusion implacable : « Vivre pour ne pas mourir, je n’en ai plus le courage ». Il décide alors d’organiser une grande fête d’adieu et de choisir sa porte de sortie, une euthanasie en Belgique. 

Il n’y a pas de colère chez Virgile, pas de résignation fataliste non plus, juste une capacité à regarder sa vie en face et à admettre que, pour lui, cette vie n’est pas une vie. Du regret bien sûr, de ne plus être en mesure de continuer à embrasser la vie, à courir, à sauter, à simplement « mettre son doigt dans son nez ». Car oui, il a aussi une certaine dose d’humour, souvent grinçant évidemment, mais tout de même. 

C’est l’auteur Zidrou (L’élève Ducobu, La Crevette, L’Obsolescence programmée de nos sentiments) qui signe le scénario de ce roman graphique. Il aborde le sujet de l’euthanasie avec une grande douceur sans jamais tomber dans le pathos ou dans le larmoyant. Le récit nous donne à suivre l’évolution psychologique de Virgile, celle de sa famille, de ses amis. Il s’attache à nous faire vivre le quotidien de l’hôpital, les visites de l’infirmière, le passage régulier du kiné, une vie chamboulée, pour tous, année après année. Ce livre n’est pas un plaidoyer grandiloquent sur l’aide active à mourir, c’est simplement le récit d’une vie de famille, avec ses failles, ses fragilités, ses questionnements, ses tensions et une grande humanité.

Graphiquement, le dessin de Lucy Mazel (Communardes ! T.1, la série Olive, Edelweiss) est très beau, le trait est très doux. La mise en couleur est lumineuse, apportant de la tendresse et de la légèreté à ce récit. C’est une grande réussite. Dès la couverture, on est happé par une ambiance printanière, par une clarté qui reflète la sérénité affichée de Virgile. Le dessin et la couleur accompagnent parfaitement ce récit qui se veut résolument pudique et subtil.

Ce livre est une ode aux choix personnels, au respect de la dignité et des valeurs de celui qui se retrouve dans le lit. Une ode à la vie en ce qu’elle a de plus joyeux et à la mort quand elle est vécue comme une porte de sortie honorable, courageuse et sereine. Et lorsqu’elle est accompagnée par les soignants et les proches.

Alexandra Durand