Fin de vie : d’aléas en promesses, la perspective du referendum ?
La vie d’un texte de loi, au Parlement, n’est pas un long fleuve tranquille.
Déjà, dans le passé lointain ou plus récent, nous avons connu de graves désillusions. En 2016, alors que nous aurions pu avoir une loi de liberté votée au Parlement, nous avons eu la loi Claeys-Leonetti dont il est nulle utilité de rappeler combien elle est insuffisante pour répondre aux drames de la fin de vie.
En décembre 2022, toutefois, une Convention citoyenne se réunissait sous l’égide du Conseil économique, social et environnemental. Elle concluait, quatre mois après, en avril 2023, à la nécessité de légiférer en matière d’aide active à mourir, offrant au patient en fin de vie la possibilité de devenir maître de sa propre destinée.
Il fallut une année, presque jour pour jour – c’était le 10 avril 2024 – pour qu’un projet de loi traduise cette volonté citoyenne et soit présenté et adopté en Conseil des Ministres.
Puis le texte entama son parcours à l’Assemblée nationale – commission spéciale puis séance publique – et… le 9 juin, la dissolution de l’Assemblée nationale réduisit à néant des dizaines d’heures de débat parfois rugueux, souvent constructifs, toujours respectueux des différences. Cette décision provoqua l’abattement, l’écœurement, chez celles et ceux qui n’avaient plus le temps d’attendre, qui comptaient sur une loi respectueuse de leur volonté pour leur épargner les souffrances inutiles et les tragédies absurdes.
Annoncée en discussion en février 2025, la loi attendue était alors présentée sous la forme de deux propositions de loi – caprice gouvernemental : la première relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs et la seconde relative au droit à l’aide à mourir.
De nouveau, un événement politique – la censure du Gouvernement, cette fois – emporta le calendrier et, avec lui, les espoirs. C’était le 5 décembre 2024.
Pourtant, malgré tous ces aléas presque inédits et sans doute grâce à la ténacité de sa présidente, le 27 mai 2025, par une très large majorité des députés (305 voix pour, 199 contre), l’Assemblée nationale adopta un dispositif, certes incomplet, en matière de fin de vie, mais qui ouvrait néanmoins la porte à la poursuite de la – fameuse – navette parlementaire.
C’est le 7 octobre 2025 qu’aurait dû débuter l’examen au Sénat des deux propositions de loi votées en première lecture par l’Assemblée nationale. Mais le renversement d’un nouveau Gouvernement, le 8 septembre 2025, puis la nomination – à deux reprises – de l‘actuel Premier ministre contraignit le calendrier parlementaire qui, en raison du débat budgétaire constitutionnellement prioritaire, reporta sine die la discussion au Sénat, suspendant les travaux en cours en commission des affaires sociales.
On apprend enfin, lors d’une question au Gouvernement posée par la députée nordiste Brigitte Liso, le 21 octobre 2025, à laquelle a répondu le ministre chargé des relations avec le Parlement, que les débats « reprendront au plus tôt », après l’examen budgétaire, et que « l’objectif est clair : que la fin de la navette se déroule avant l’été 2026. »
Nous voulons y croire…
Mais les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent, dit le dicton.
Alors, le président de l’ADMD, Jonathan Denis, réélu pour un mandat de quatre ans à la tête de notre association, prudent, reprenait lors de la 45e assemblée générale de l’ADMD, les mots du président de la République répondant, le 13 mai 2025, au journaliste Charles Biétry atteint de la maladie de Charcot :
« Si on voyait un enlisement, l’impossibilité d’aller au bout du texte, je pense que le referendum peut être une voie pour le débloquer. »
Aussi, sur proposition de son président, le conseil d’administration de l’ADMD a voté à l’unanimité, lors de sa réunion du 11 octobre 2025, en faveur d’une demande de recours au referendum (1er alinéa de l’article 11 de la Constitution) si les deux textes sur la fin de vie, à savoir la proposition n°661 relative au droit à l’aide à mourir et la proposition n°662 visant à garantir l’égal accès de tous à l’accompagnement et aux soins palliatifs, devaient ne pas être annoncés à l’ordre du jour du Sénat au 31 décembre 2025.
Les Français sont prêts. Les militants de l’ADMD seront entièrement mobilisés.
Philippe Lohéac
Délégué général de l'ADMD

